Volume 30 : Chapitre 1, Grande Montagne 1–10

Grande Montagne 1

Nichiren déclare : « Je désire que tous mes disciples fassent un grand vœu. » (Écrits, 1013) Il est dit aussi dans le Recueil des enseignements oraux : « Le “grand vœu” désigne la propagation du Sûtra du Lotus » (OTT, 82), et il prédit que la « grande Loi pure du Sûtra du Lotus se répandra largement […] dans tout le Jambudvipa [le monde entier] » (Écrits, 555).

Nous, membres de la Soka Gakkai, allons de l’avant avec un engagement indéfectible pour réaliser le kosen rufu mondial. Notre souhait est d’apporter le bonheur à toutes les personnes avec lesquelles nous avons un lien – aux membres de notre famille, à nos proches et amis, à nos collègues et voisins, ainsi qu’à toutes les autres personnes de notre environnement.

C’est à travers nos relations avec les autres que nous nous développons et nous élevons ; que nous apprenons les uns des autres ; que nous nous aidons et nous soutenons mutuellement, et que nous cultivons une véritable humanité. Il est impossible de goûter le bonheur uniquement pour soi-même. Le véritable bonheur se partage avec les autres.

Se tourner vers une personne pour lui transmettre le bouddhisme de Nichiren est l’expression de notre souhait de la voir devenir heureuse. Grâce à nos efforts sincères, sérieux et chaleureux pour instaurer un dialogue de personne à personne avec notre entourage à propos de notre pratique bouddhique, nous élargissons le cercle du bonheur et ouvrons la voie de la paix.

Shin’ichi Yamamoto et les membres de la délégation de la Soka Gakkai avec lesquels il s’était rendu en Inde1 quittèrent Calcutta le 16 février 1979 au soir, et atterrirent à Hong Kong après 22 heures.

Shin’ichi avait commencé ses voyages pour kosen rufu en Asie dix-huit ans plus tôt, à Hong Kong, et c’est aussi là qu’il se rendait pour le dernier de ses déplacements à l’étranger avant la fin de la période des Sept Cloches2 [le 3 mai 1979].

Le lendemain matin, 17 février, alors que Shin’ichi admirait le lever du Soleil sur Hong Kong – le « havre de la paix » de kosen rufu en Asie –, il renouvela sa détermination et exprima sa vision de l’avenir du kosen rufu mondial.

Ce soir-là, il était invité avec les membres de sa délégation à un banquet de bienvenue donné par le vice-chancelier, Ma Lin, de l’université chinoise de Hong Kong. Shin’ichi saisit cette opportunité pour évoquer les modalités d’échanges universitaires et éducatifs entre l’université Soka et l’université chinoise de Hong Kong.

Shin’ichi voulait jeter de nombreux ponts d’échanges avec d’autres pays dans les domaines de l’éducation et de la culture, car il était convaincu que ce genre d’actions était crucial pour l’avenir du XXIe siècle et pour la paix mondiale. L’instant présent contient déjà l’avenir. C’est notre manière d’agir et de vivre à chaque instant, jour après jour, qui détermine l’avenir.

Un sûtra dit : « […] si vous voulez comprendre les résultats qui se manifesteront dans l’avenir, observez les causes créées dans le présent. » (Écrits, 283)

« C’est maintenant ou jamais ! Je ne dois pas laisser passer ce moment si précieux ! » se disait Shin’ichi.

Grande Montagne 2

Le 18 février, Shin’ichi assista à une conférence des représentants de la Soka Gakkai d’Asie du Sud-Est dans un hôtel de Hong Kong. Soixante-cinq membres y participèrent, venus de neuf pays, notamment Singapour, la Malaisie, les Philippines et l’Indonésie, ainsi que des territoires de Hong Kong et Macao. Beaucoup d’entre eux avaient revêtu les costumes traditionnels hauts en couleur de leur pays d’origine, à l’occasion de la célébration de la fin des Sept Cloches, qui marquait un nouveau départ pour kosen rufu en Asie du Sud-Est.

Tous avaient surmonté de grands obstacles pour ouvrir la voie de kosen rufu dans leurs pays et territoires respectifs. Beaucoup étaient des Japonais, partis vivre à l’étranger en n’ayant pratiquement aucune maîtrise de la langue locale, mais qui, par les gestes et mots qu’ils avaient réussi à apprendre, avaient lutté sincèrement pour transmettre le message du bouddhisme de Nichiren autour d’eux.

Les pays de l’Asie du Sud-Est avaient été envahis par l’armée japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale, et les sentiments anti-japonais étaient encore profondément ancrés dans la société. Nombreux étaient ceux qui réagissaient ouvertement avec hostilité quand ils apprenaient que la Soka Gakkai était un mouvement originaire du Japon.

Toutefois, les membres pionniers refusèrent de battre en retraite, en dépit des murs épais de l’incompréhension et des idées fausses qui venaient leur barrer la route. Ils étaient déterminés à devenir heureux grâce à leur pratique bouddhique, là où ils vivaient. Étant les seuls membres de la Soka Gakkai, ils savaient que l’essor de kosen rufu dans leur région reposait uniquement sur leurs efforts.

Cet engagement personnel à se dresser et à agir est la force motrice de kosen rufu. Quels que soient les changements dans le futur, il ne peut y avoir d’expansion sans ce type d’engagement.

Bien que le climat religieux, les coutumes et les traditions aient été très différents des leurs, les membres japonais d’Asie du Sud-Est persévérèrent dans leurs efforts de dialogue et élargirent ainsi le cercle des membres d’abord à une, deux, puis à des dizaines, des centaines, et finalement à des milliers de personnes.

Nichiren déclare que les grands bodhisattvas surgis de la Terre apparaissent « au début de l’époque de la Fin de la Loi pour enseigner à tous les êtres vivants de ce continent du Jambudvipa [le monde entier] la récitation des cinq caractères de Nam-myoho-renge-kyo3, qui constituent le cœur du chapitre “Durée de la vie” de l’enseignement essentiel [du Sûtra du Lotus] » (WND-II, 688).

Tous les membres de l’Asie du Sud-Est étaient des personnes ordinaires et anonymes qui ouvraient la voie de kosen rufu, tout en étant confrontées à divers problèmes et combats personnels. Il s’agissait pourtant des bodhisattvas surgis de la Terre, les émissaires du Bouddha dotés d’une grande mission pour kosen rufu, apparus en cette ère troublée de l’époque de la Fin de la Loi.

Shin’ichi observa les membres avec le sentiment d’avoir devant lui un rassemblement de bouddhas. Il leur exprima sa profonde reconnaissance et son respect, et fit leur éloge.

Grande Montagne 3

Lors de la conférence des représentants de l’Asie du Sud-Est, Shin’ichi Yamamoto cita les qualités que les membres devaient s’efforcer d’incarner en tant que responsables de kosen rufu dans leurs pays et territoires respectifs : « Certaines personnes vivent sans apporter la moindre contribution à la société, en se préoccupant uniquement de leur bien-être. D’autres font de grands efforts dans leur pratique pour promouvoir les enseignements du bouddhisme de Nichiren afin d’établir un bonheur durable pour eux-mêmes et pour les autres. Il y a aussi des personnes qui, bien qu’elles clament avoir foi dans la Loi merveilleuse, se contentent de suivre passivement et évitent de déployer de véritables et sincères efforts pour faire avancer kosen rufu.

« Vous parviendrez peut-être à duper les autres, mais personne n’échappe à la Loi bouddhique de cause et d’effet, qui est stricte et rigoureuse. Le Gohonzon sait tout. Ainsi, du point de vue du bouddhisme, tout ce que vous faites pour contribuer à ouvrir de magnifiques nouvelles voies en tant que pionniers de kosen rufu en Asie est infiniment précieux, et les bienfaits que vous accumulerez en retour dans votre vie seront véritablement immenses.

« Nichiren écrit : “Veillez à développer votre foi jusqu’au dernier moment de votre vie. Autrement, vous aurez des regrets.” (Écrits, 1037) C’est pourquoi j’aimerais que chacune et chacun de vous vive avec fierté, en s’engageant tout au long de sa vie à transmettre la Loi merveilleuse. Si vous persévérez dans la pratique bouddhique jusqu’au bout, vous atteindrez à coup sûr un état de bonheur indestructible et goûterez une vie pleine de bonne fortune. »

Shin’ichi offrit ensuite trois orientations que les responsables du mouvement du kosen rufu mondial doivent garder à l’esprit.

« Premièrement, rappelez-vous que les membres possèdent tous le noble état de bouddha. Bien qu’il existe différents niveaux de responsabilités au sein de la Soka Gakkai, qui permettent d’en assurer le fonctionnement et la coordination, en tant qu’êtres humains, nous sommes égaux ; personne n’est inférieur ou supérieur aux autres. Ne pensez jamais que votre rôle de responsable vous donne le droit de parler durement aux autres ou de leur manquer de respect.

« Deuxièmement, ne laissez jamais la quête de votre profit personnel s’immiscer dans le domaine de la foi et poser des problèmes de conflits d’intérêts dans la Soka Gakkai.

« Troisièmement, souvenez-vous que notre objectif est le bonheur des membres, et que notre organisation n’est qu’un moyen pour parvenir à cette fin. Dans ce contexte, on peut éventuellement être rigoureux quant à l’attitude à avoir dans la foi mais, en revanche, en ce qui concerne le fonctionnement de l’organisation, demandez toujours l’avis des autres, respectez l’autonomie de chaque personne, et cherchez à créer une organisation démocratique et harmonieuse. »

Grande Montagne 4

« Toutes les personnes réunies ici aujourd’hui, pensa Shin’ichi, ont la noble mission d’illuminer l’Asie, en apportant la lumière du bonheur grâce au bouddhisme du soleil de Nichiren. Leurs actions et leur développement détermineront le succès de kosen rufu dans leurs pays et territoires respectifs. Je souhaite que chacune et chacun d’eux développe davantage ses capacités afin de devenir un responsable de kosen rufu plein de courage et de sagesse, et possédant la force de mille personnes. »

Il poursuivit avec conviction : « Nous vivons dans le monde de la foi. Par conséquent, nous devrions nous unir sur le fondement du Gohonzon, en prenant la foi pour guide. Si nous nous laissons gouverner par nos émotions, alors la jalousie et les conflits apparaîtront à coup sûr. Ce sera le signe que les fonctions démoniaques qui se manifestent en nous ont pris le dessus et que nous nous détournons des enseignements bouddhiques. Créer ensemble l’unité signifie lutter contre ces démons intérieurs, et nous unir autour de notre mission commune est la preuve que nous accomplissons notre révolution humaine, en devenant maître de notre cœur et en remportant la victoire sur notre propre négativité.

« J’espère que vous serez des responsables dotés d’un grand cœur et que vous veillerez sincèrement sur les membres, en respectant la société et en aimant le lieu où vous vivez. Kosen rufu signifie que chacune et chacun de vous, qui fonde sa vie sur l’enseignement suprême du bouddhisme de Nichiren, doit devenir un pilier de la spiritualité, un pilier qui bénéficie de la confiance de tous et qui représente un exemple en matière de responsabilité sociale dans son pays.

« Le voyage de kosen rufu est inévitablement parsemé de difficultés et d’obstacles. Nous aurons peut-être à lutter contre des oppositions et des persécutions, dues à l’ignorance et à une mauvaise compréhension des objectifs de la Soka Gakkai. Certains membres abandonneront leur foi ; d’autres trahiront ou essaieront de créer des divisions au sein de notre organisation. Le roi-démon du sixième ciel cherche toujours à détruire le mouvement de kosen rufu par des moyens imprévisibles.

« Mais quels que soient les défis que vous aurez à relever dans l’avenir, croyez dans le Gohonzon et consacrez votre vie à kosen rufu au sein de la Soka Gakkai, l’organisation qui agit en accord avec le vœu du Bouddha. En luttant et en remportant la victoire sur de grandes épreuves, vous accumulerez des bienfaits incommensurables et établirez un bonheur aux fondations indestructibles. Vous contribuerez ainsi à un remarquable essor de kosen rufu dans vos pays respectifs.

« La foi, c’est le courage. Avancez avec audace, en ayant le cœur d’un roi-lion. J’aimerais que vous partagiez le bouddhisme du soleil avec une foi aussi lumineuse que le Soleil, et que vous ouvriez la voie du kosen rufu mondial. »

Shin’ichi lançait là un appel sincère, imprégné par ses prières.

Grande Montagne 5

Le matin du 19 février, Shin’ichi Yamamoto rendit une visite de courtoisie au gouverneur de Hong Kong, sir Murray MacLehose, dans sa résidence officielle. Le gouverneur connaissait Shin’ichi grâce à son ami, l’ambassadeur britannique au Japon, sir Michael Wilford, qui lui avait parlé de lui dans ses lettres, et il avait hâte de le rencontrer.

Il eut avec Shin’ichi une conversation enthousiaste, au cours de laquelle ils évoquèrent les succès de la politique et du niveau de protection sociale à Hong Kong, qui connaissait alors une période de prospérité croissante.

Le gouverneur étant également le chancelier de l’université chinoise de Hong Kong, ils évoquèrent aussi les échanges pédagogiques entre cette université et l’université Soka.

Shin’ichi exprima sa profonde reconnaissance au gouverneur pour le soutien qu’il lui apportait en tant que chancelier de l’université, et il lui fit part de ses sentiments : « Je pense que les échanges éducatifs entre nos deux universités devraient permettre aux jeunes de nouer de nouveaux liens d’amitié, d’échanger librement leurs points de vue sur l’avenir du monde, et d’avancer ensemble dans un esprit de coopération mutuelle.

« À travers de tels échanges, je souhaite soutenir des personnes de valeur qui, en transcendant leurs différences de nationalité, d’origines ethniques, de religion, de coutumes et de traditions, pourront partager leurs épreuves et leurs souffrances ainsi que leurs joies et agir ensemble vers la réalisation d’objectifs communs. »

Le gouverneur déclara chaleureusement qu’il était tout à fait d’accord.

Finalement, le monde se résume aux relations humaines. En ayant bien conscience que nous sommes tous des êtres humains, nous devrions pouvoir communiquer les uns avec les autres, nous comprendre et éprouver de l’empathie envers autrui.

Il ne restait qu’un peu plus de deux décennies avant le début du XXIe siècle. Il y avait de nombreux sujets sur lesquels Shin’ichi ressentait la nécessité d’agir de toute urgence pour la paix dans le monde et l’avenir de l’humanité. Il aurait aimé avoir davantage de temps devant lui. La vie est une lutte contre le temps.

Cet après-midi-là, Shin’ichi et sa délégation assistèrent à un festival culturel organisé par les membres de Hong Kong dans le Hall de la communauté académique de Kowloon.

Cinq cent cinquante-six membres au total participèrent à ce festival, où ils exprimèrent avec passion leur désir de paix en Asie, à travers un spectacle coloré et captivant, comportant notamment une danse de cour chinoise, une danse de la moisson, une danse du lion, et des chorales et prestations musicales.

L’éclatante énergie de celles et ceux qui aspirent au bonheur des personnes ordinaires et agissent dans ce sens est une source de créativité, qui enrichit l’art et la culture.

Grande Montagne 6

Les participants au festival étaient d’origines culturelles très diverses. On trouvait notamment parmi eux des Chinois, des Britanniques et des Japonais. Durant le final, tout le monde se retrouva sur scène – même l’équipe des machinistes avec leurs casques de sécurité, et les autres personnes chargées de l’organisation. Tous se tenaient la main et entonnaient avec enthousiasme Le chant de kosen rufu à Hong Kong. Pour Shin’ichi, c’était bien le symbole d’une véritable et authentique harmonie humaine.

Durant les dix-huit années écoulées depuis la création du premier district de la Soka Gakkai à Hong Kong, les membres s’étaient développés au point de pouvoir organiser un festival culturel aussi vaste et splendide.

Shin’ichi souhaitait fournir encore davantage d’efforts pour le développement du mouvement dans le monde entier. Mais il était si occupé qu’il lui était très difficile de trouver, dans son planning très chargé, du temps pour voyager hors du Japon. « Si je parviens vraiment à me concentrer maintenant sur chaque pays, pensa-t-il, il sera possible de réaliser une très importante progression vers kosen rufu, vers la paix mondiale. Je ne dois pas laisser passer cette occasion. »

Shin’ichi, qui était assis parmi les spectateurs, se leva pour prendre la parole :

« Tous les êtres humains sont égaux ; tous sont membres de la famille humaine. Tel est l’enseignement du bouddhisme de Nichiren que nous pratiquons, et je crois fermement que les prestations d’aujourd’hui incarnent bien cette réalité.

« Nous pratiquons le bouddhisme pour devenir heureux et parvenir à un épanouissement durable. De plus, nous pratiquons pour former des liens d’amitié avec les autres dans notre société et développer notre réseau pour la paix.

« Je sens à travers vos airs joyeux et enthousiastes que vous êtes heureux et avez un objectif qui nourrit votre vie. Votre ferme unité est un microcosme pour la paix forgé par l’amitié. Voilà ce que je souhaite déclarer solennellement pour que tout le monde l’entende.

« Construire la paix mondiale est notre mission en tant que pratiquants du bouddhisme de Nichiren. Mais la paix n’est pas un concept abstrait, éloigné de notre vie ; elle consiste à élargir le cercle de l’amitié et de la confiance dans notre entourage et dans notre environnement, et à y créer un modèle d’harmonie humaine. J’espère que, à partir de Hong Kong, vous ferez se lever le soleil du siècle de la paix. »

Shin’ichi était convaincu que le phare de la paix destiné à illuminer le XXIe siècle se dressait déjà à Hong Kong.

Grande Montagne 7

De retour d’Inde et de Hong Kong, Shin’ichi Yamamoto et la délégation de la Soka Gakkai parvinrent à l’aéroport international de Narita à 19 heures, le 20 février.

Shin’ichi pensa : « Ce sera bientôt la fin des Sept Cloches et le début d’une nouvelle phase de quatre périodes de cinq ans jusqu’au XXIe siècle. Le moment est venu de nous élancer de nouveau de l’avant ! Nous devons atteindre la vitesse d’accélération maximale pour prendre un nouvel envol. L’essentiel est de rester vigilant et d’accorder la plus grande attention à chaque détail. Je vais faire encore plus d’efforts pour encourager les membres afin qu’ils puissent unir leurs cœurs et progresser avec espoir. Je vais rencontrer autant de membres que possible et partager avec eux l’esprit du mouvement Soka, qui consiste à consacrer sa vie à kosen rufu ! »

Le 21 février, lendemain de son retour au Japon, Shin’ichi s’attacha à écrire des articles sur son voyage en Inde, à la demande de plusieurs journaux. Le 22 février, après avoir encouragé des membres de pays nordiques en visite au Japon, il partit pour un voyage d’encouragement dans la préfecture de Chiba. Le 25 février, il posa pour des photos commémoratives avec des membres des préfectures de Yamanashi et Ibaraki, qui s’étaient réunis au centre culturel Soka, dans le quartier de Shinanomachi, à Tokyo.

Deux jours plus tard, le 27 février, il se rendit dans la préfecture de Kanagawa pour participer à une cérémonie de Gongyo avec des responsables de grand groupe (plus tard district) du département des femmes, au centre culturel de Shonan, dans la ville de Fujisawa. Puis il fit Gongyo et offrit des encouragements lors d’une commémoration ‒ comportant trois sessions séparées ‒ destinée à célébrer le 16e anniversaire de la création du chapitre Fujisawa. Le lendemain, il participa à deux cérémonies de Gongyo commémorant l’ouverture du centre culturel d’Odawara.

Shin’ichi passa ses journées à courir de toutes ses forces, sans un instant de pause.

C’est à peu près à cette époque que les moines de la Nichiren Shoshu se mirent une fois de plus à attaquer et critiquer la Soka Gakkai dans tout le pays. Shin’ichi se donna bien du mal pour protéger du mieux possible les membres. Lors d’une réunion de responsables de la Soka Gakkai commémorant le 48e anniversaire de l’organisation laïque, le 7 novembre de l’année précédente4, la Soka Gakkai et la Nichiren Shoshu avaient réaffirmé leur engagement à créer l’harmonie entre moines et laïcs. Cette réunion était censée permettre de résoudre les problèmes. Cependant, peu après, certains magazines japonais à scandale se mirent à publier des histoires prétendant que les efforts de réconciliation de la Soka Gakkai étaient un leurre. Derrière ces articles se trouvait un stratagème visant à encourager les attaques contre l’organisation laïque.

La voie des lions de Soka est toujours escarpée et dangereuse.

Grande Montagne 8

Les moines de la Nichiren Shoshu utilisaient tous les arguments possibles pour justifier leurs attaques contre la Soka Gakkai. Au début de l’année 1979, ils citèrent un responsable du département des étudiants, qui avait appelé les membres à « démontrer clairement que la Soka Gakkai était juste et équitable », pour prouver que l’organisation laïque ne s’était pas du tout amendée.

Le 28 janvier, la deuxième réunion générale nationale des membres du groupe danto ‒ des croyants laïques rattachés à un temple de la Nichiren Shoshu ayant une attitude critique à l’égard de la Soka Gakkai ‒ se tint au Temple principal, le Taiseki-ji. Lors de cette réunion, à laquelle assistaient deux cent trente moines et cinq mille membres du groupe danto, il fut réaffirmé que la Soka Gakkai était coupable d’offense à la Loi et qu’il ne pouvait y avoir de réconciliation ou de compromis dans ces conditions.

Cependant, la Soka Gakkai continua de faire preuve de beaucoup de patience et de tolérance pour maintenir l’harmonie, en prenant les plus grandes précautions et en faisant preuve de retenue dans ses rapports avec le clergé.

Puis, au début du mois de mars, un moine, qui avait la fonction de secrétaire du grand patriarche, appela le vice-président de la Soka Gakkai, Eisuke Akizuki, et lui dit : « Le vice-président de la Soka Gakkai, Genji Samejima, a émis diverses déclarations concernant les problèmes entre le clergé et la Soka Gakkai. Le grand patriarche et beaucoup d’entre nous ont été surpris par ses remarques. Nous allons vous poser des questions par écrit à ce sujet et exigeons une réponse de votre part. »

Le clergé faisait là référence aux déclarations irresponsables de Samejima, prononcées lors d’une réunion à Omuta, dans la préfecture de Fukuoka, le 6 mars, pour promouvoir l’harmonie entre la Soka Gakkai et le clergé. En de nombreuses occasions par le passé, Samejima avait causé beaucoup de tourments aux membres de Kyushu au cœur pur par ses paroles et ses actions irréfléchies.

Lors de la réunion en question, il avait notamment déclaré : « Le Temple principal n’est guère plus qu’un grand centre touristique » et « les critiques du clergé à l’encontre de la Soka Gakkai ne sont que des soupçons sans fondement motivés par la jalousie ». Non seulement il diffusait imprudemment des opinions personnelles de ce type, mais prétendait en plus que c’était là le point de vue de tous les vice-présidents de la Soka Gakkai.

Le clergé en fut informé et il s’ensuivit tout naturellement un grand tumulte. Fustigeant l’insolence de Samejima, le bureau administratif de la Nichiren Shoshu et le département des affaires intérieures envoyèrent des lettres interrogeant la Soka Gakkai à ce sujet.

Nichiren écrit : « Le malheur sort de notre bouche et provoque notre perte […]. » (Écrits, 1144) L’arrogance et la négligence provoquent des malheurs, qui non seulement ne peuvent conduire qu’à notre propre chute, mais détruisent également le mouvement de kosen rufu. Les remarques particulièrement mal venues émises par un seul responsable donnèrent aux moines qui cherchaient à contrôler et à soumettre les laïcs des arguments parfaits pour attaquer la Soka Gakkai.

Le voyage de kosen rufu implique de toujours affronter des mers déchaînées.

Grande Montagne 9

Genji Samejima était vice-président de la Soka Gakkai. En tant que président, Shin’ichi devint donc la cible principale des protestations du clergé.

Les moines de la Nichiren Shoshu clamèrent haut et fort que, selon les remarques de Samejima, ni la Soka Gakkai ni le président Yamamoto n’éprouvaient le moindre regret concernant ce qui s’était produit et qu’ils n’avaient jamais eu non plus l’intention de soutenir sincèrement le clergé.

La Soka Gakkai avait déployé de grands efforts pour remédier à la situation, mais ces efforts sincères ne semblaient mener à rien.

Shin’ichi occupait la fonction de responsable principal de toutes les organisations laïques de la Nichiren Shoshu, et des moines se mirent à exiger qu’il soit démis de sa fonction. Certains envoyèrent même des lettres pour le dénoncer.

Puis, à la fin du mois de mars 1979, la fédération du Hokkeko, une association de groupes laïcs de tout le Japon affiliés à la Nichiren Shoshu, appela à une réunion d’urgence de ses directeurs et adopta une recommandation demandant au président de la Soka Gakkai de démissionner de son poste de représentant principal de toutes les organisations laïques de la Nichiren Shoshu. Une lettre fut envoyée en ce sens.

Par ailleurs, d’anciens membres de la Soka Gakkai devenus membres du groupe danto lancèrent eux aussi un appel au président Yamamoto pour qu’il prenne de lui-même la responsabilité de démissionner.

Le 2 avril marquait le 21e anniversaire de la disparition du deuxième président de la Soka Gakkai, Josei Toda. Des cérémonies de commémoration eurent lieu au siège de la Soka Gakkai, à Tokyo, et dans les principaux centres de la Soka Gakkai, dans chaque arrondissement et préfecture du Japon. Les fleurs de cerisier étaient alors totalement épanouies et s’agitaient avec grâce dans la brise du printemps.

Shin’ichi participa à la cérémonie commémorative à l’annexe du siège de la Soka Gakkai dans le quartier de Shinanomachi, à Tokyo, avec le directeur général Kiyoshi Jujo, le vice-président Eisuke Akizuki et la proche famille de Toda.

Cette commémoration eut lieu à une époque où la Soka Gakkai était en pleine tourmente. Sachant, cependant, qu’il avait accompli tous les rêves de son maître, Shin’ichi avait un cœur aussi clair et brillant que le ciel bleu. Il était satisfait de la façon dont il avait mené sa vie jusqu’alors en tant que disciple de Toda. Les disciples authentiques peuvent toujours garder leur maître dans leur cœur et lui faire face avec joie et fierté.

La septième des Sept Cloches, séries successives de périodes de développement de sept ans annoncées par son maître, parvenait à son terme. Comme un fleuve s’écoulant vers la mer, le grand courant de kosen rufu se répandait dans le monde entier. De solides fondations avaient été établies pour que la Soka Gakkai prenne son envol au XXIe siècle, et l’organisation venait de s’engager dans une nouvelle phase.

Shin’ichi se rappela avec force qu’il devait être prêt à affronter les assauts toujours plus féroces des fonctions démoniaques, qui ne manqueraient pas d’apparaître à mesure que kosen rufu poursuivrait sa progression.

Grande Montagne 10

Tout en pratiquant pour son maître durant la cérémonie commémorative, Shin’ichi imagina le regard de Toda posé sur lui.

Il pouvait l’entendre lui dire : « Shin’ichi, je compte sur toi pour réaliser le kosen rufu mondial ! N’aie aucune crainte ! Avec audace, engage-toi sur la grande voie de ta mission ! »

Il sentit le courage se lever dans son cœur et un puissant élan traverser tout son être.

« Je suis le disciple de M. Toda. Je suis l’héritier de ce roi-lion héroïque qui s’est dressé seul pour kosen rufu ! Quoi qu’il m’arrive, je transmettrai fidèlement le bouddhisme de Nichiren et l’esprit de la Soka Gakkai ! Je lutterai pour protéger les membres, qui sont les nobles enfants du Bouddha ! »

Quand Shin’ichi revint chez lui après la cérémonie commémorative, il réfléchit aux problèmes entre la Soka Gakkai et le clergé de la Nichiren Shoshu.

La Soka Gakkai avait toujours fait de son mieux pour protéger et soutenir la Nichiren Shoshu, lui permettant ainsi de s’épanouir. La Soka Gakkai s’était aussi consacrée avec une grande énergie à répandre largement les idéaux et les principes du bouddhisme de Nichiren dans la société afin de réaliser kosen rufu. Mais les moines de la Nichiren Shoshu couvrirent de mépris les membres et poursuivirent leurs critiques et attaques incessantes contre l’organisation. Ils cherchèrent querelle aux membres à propos de tout ce qu’ils avaient pu dire ou faire, en prétendant que la Soka Gakkai déformait les enseignements ou offensait la Loi. Leurs actions étaient dépourvues de toute compassion.

Les membres de la Soka Gakkai avaient dû endurer le comportement irrespectueux et tyrannique des moines, en contenant leur indignation et leur frustration. Conscient de cela, Shin’ichi ne pouvait rester inactif.

Pour maintenir l’harmonie entre les moines et les laïcs et protéger ses membres, la Soka Gakkai avait fait tous les efforts possibles afin de remédier à la situation. Elle avait patiemment écouté et pris en compte les réclamations du clergé qui, cependant, persista dans ses attaques.

Il y avait une culture profondément ancrée au sein de la Nichiren Shoshu ‒ renforcée durant des siècles au Japon par le système danka5 ‒, selon laquelle les moines étaient supérieurs aux pratiquants laïques. Depuis les débuts de la Soka Gakkai, les moines avaient brandi leur autorité cléricale et provoqué en de nombreuses occasions des souffrances chez les membres de la Soka Gakkai.

Cela allait totalement à l’encontre de l’esprit de Nichiren. En déclarant notamment « Tous les disciples de Nichiren, moines et laïcs, […] en transcendant toute différence entre eux » (Écrits, 218), Nichiren affirma dans ses écrits que moines et pratiquants laïcs étaient égaux.

Le bouddhisme de Nichiren est un enseignement égalitaire qui détruit les barrières des discriminations.

  • *1La visite en Inde s’est déroulée du 6 au 16 février 1979.
  • *2Sept Cloches : terme qui correspond au développement de la Soka Gakkai, durant sept périodes consécutives de sept ans, depuis sa fondation en 1930 jusqu’en 1979. Le 3 mai 1958, peu après le décès du président Toda (le 2 avril), le président Ikeda, alors secrétaire général du département de la jeunesse, présenta ce concept des Sept Cloches et annonça des objectifs pour les périodes de sept ans à venir.
  • *3Myoho-renge-kyo s’écrit avec cinq caractères chinois, alors que Nam-myoho-renge-kyo en compte sept (nam ou namu étant composé de deux caractères). Dans ses écrits, Nichiren utilise souvent Myoho-renge-kyo comme synonyme de Nam-myoho-renge-kyo.
  • *4Cette réunion est décrite en détail dans le premier chapitre du vingt-neuvième volume de La Nouvelle Révolution humaine, intitulé « Joie éternelle ».
  • *5Cf. épisode 7 et 8 du chapitre « Justice », La Nouvelle Révolution humaine, vol. 27.